Grégoire Berger un poisson dans l’eau à l’Ossiano – Dubai
D’un océan à un autre, il n’y a qu’un pas que ce jeune Breton a franchi voilà quatre années pour s’installer à Dubaï. A 32 ans, Grégoire Berger est le chef d’Ossiano, l’un des 24 restaurants du gigantesque complexe hôtelier cinq étoiles Atlantis The Palm Dubai. Une table au cadre à couper le souffle, puisque les clients dinent au milieu des centaines de poissons, requins et tortues de l’aquarium l’Ambassador Lagoon. Ici, le chef laisse libre cours à sa personnalité et propose une cuisine créative, entre influences bretonnes et produits du monde entier.
Vous avez démarré votre formation et votre carrière de chef dans votre région, la Bretagne ?
Oui car je suis un pur produit du Morbihan ! J’ai fait mes classes à La Closerie de Kerdrain à Auray, au Pressoir à Saint-Avé, et au domaine de Rochevilaine à Billiers en parallèle de mon BEP et de mon bac pro en cuisine.
J’ai énormément appris dans ces étoilés, j’y ai vraiment acquis de très bonnes bases. Et la Bretagne, avec ses embruns, ses plages et son univers, m’a apporté la conscience du produit. Ensuite, j’ai décidé de voyager, de découvrir le monde.
Dans quels pays avez-vous travaillé ?
Je suis d’abord parti en Andorre, puis assez rapidement aux États-Unis, lorsque j’ai eu 20 ans où j’ai été chef de parti pour Paul Bocuse, au Bistro de Paris. J’ai rencontré d’autres personnes, d’autres philosophies, d’autres cuisines et d’autres produits… Et puis j’ai appris l’anglais. Ça a été probablement une de mes plus belles expériences ! J’ai également habité au Maroc pendant quelques temps et ouvert un restaurant là-bas.
Voyager m’a apporté une ouverture sur le monde, de ne pas rester figé sur mes acquis. Ensuite, je suis revenu à Paris en tant que sous-chef de Frédéric Robert à la Grande Cascade. Puis j’ai décidé de travailler comme chef privé pour Suez Environnement, à la Défense, où j’étais en charge des délégations les plus prestigieuses. Pendant un an et demi, je me suis vraiment perfectionné, je devais changer de menu tous les jours. Et puis, avec mon épouse, on a eu envie de repartir et une opportunité à Dubaï s’est présentée
Pourquoi Dubaï ?
Ici tout se rejoint, les chefs comme les cuisines, donc c’est un laboratoire fantastique pour apprendre. Mais le plus important à mes yeux, ce sont les perspectives d’évolution et de développement. Tout est possible ici !
Comment s’est passée votre arrivée ici ?
Bien … même si c’est vrai qu’au début, c’est compliqué. C’est un monde à part, très « exotique », tout est très grand, la vie coûte cher. Et ça a été difficile, en arrivant, de m’intégrer dans un univers très anglophone.
Que demandent les clients aux Émirats ?
Du goût ! Le restaurant gastronomique traditionnel ne fonctionne pas réellement ici. Alors il faut trouver des saveurs percutantes, et c’est vers cela que j’ai dirigé ma cuisine. L’attente des clients à Dubaï est vraiment diverse, nous recevons environ 70 nationalités différentes chaque mois ! Pour plaire à tous les palais, je mets des épices, des « kicks » qui réveillent et excitent le palais des clients.
Il faut que chacun, peu importe d’où il vient, puisse avoir une émotion, obtiennent quelque chose de percutant en bouche. Je cherche à inscrire mes plats dans leur mémoire.
Comment avez-vous transposé l’identité culinaire bretonne à Dubaï ? Avec quels produits ?
J’essaye d’amener ma région ici avec des produits comme le beurre de baratte. Je travaille également beaucoup le côté terre-mer, très inscrit en Bretagne. Mais mon produit phare, c’est vraiment le sarrasin. Étonnement, ce n’est pas du sarrasin breton que j’utilise, mais du sarrasin russe. Il y en a du très bon là-bas, comme au Japon d’ailleurs, et l’effet reste le même. C’est l’ingrédient un peu touche « mémoire » de ma Bretagne.
Y a-t-il des produits locaux avec lesquels vous pouvez travailler ?
Pour mon restaurant, très peu … Par exemple, les poissons sont issus de mer très chaudes et ils ont une chaire assez floconneuse, pas extraordinaire en goût. Il y a donc beaucoup de produits que l’on importe du monde entier. Mais parmi les denrées locales que j’utilise, il y a les dates, certains citrons, ou du lait de chameau pour faire une crème glacée.
N’est ce pas trop frustrant pour un chef de ne pas pouvoir cuisinier « locavore » ?
C’est frustrant, certes. Et en termes d’impact écologique, il ne faut pas nier que c’est dérangeant. Même si tous nos produits sont très respectueux de l’environnement, issus de l’agriculture raisonnée, nous devons malheureusement les faire venir de l’extérieur, et ça c’est un point négatif. En revanche, le côté positif, c’est que nous bénéficions des saisons du monde entier : par exemple, la truffe noire d’Australie et la truffe noire du Périgord selon leurs saisons. Et nous utilisons des produits de tous les pays : Japon, Pays-Bas … On arrive à faire une vraie cuisine du monde.
Le fait d’être un chef français à l’étranger, quel impact sur la clientèle ?
Cela rassure les clients. Maintenant, en tant que chef, nous devons faire attention ! Vivant au milieu de la planète avec des chefs talentueux du monde entier, je peux vous assurer que la concurrence est rude. Être français reste un gage de qualité car il est inscrit dans les mémoires que la cuisine française est la meilleure au monde. Pour notre clientèle, le fait d’être français apporte un plus, c’est indéniable. A nous de cultiver cet effet et de continuer à travailler dur pour rester la référence.
De quelle manière vous employez-vous à maintenir cette excellence ?
Les gens ne viennent pas chez vous parce juste parce que vous êtes français ou que vous faites une cuisine française ! Ils viennent grâce au bouche à oreille. A Ossiano, c’est comme ça que nous avons construit notre réputation en quatre ans. Nous accordons de l’importance à la satisfaction des clients au jour le jour et je fais en sorte d’apporter une singularité dans notre cuisine. Avec le menu « culinary journey », je propose un voyage gastronomique en 11 plats avec des histoires tout autour. C’est un menu que j’ai créé au-delà d’une simple expérience culinaire, plutôt comme une expérience globale dans ce cadre magnifique avec sa vue sur l’aquarium, une expérience unique complètement endémique de notre restaurant.
Qui sont les chefs français qui vous inspirent ?
Yannick Alléno a été pour moi un des chefs les plus avant-gardiste. Benoit Violier de l’Hôtel de Ville de Crissier, malheureusement décédé, représente pour moi le fine-dining suprême, le restaurant gastronomique à l’état le plus sacralisé. Mais j’ai également été inspiré par des chefs étrangers comme Quique Da Costa ou David Munoz en Espagne En Italie aussi, il y a des très bons chefs. Mais plus j’avance, plus je m’aperçois que ce ne sont pas les chefs qui m’inspirent mais plutôt l’art, l’univers, l’environnement en termes de création. Vous savez, on cuisine vraiment d’une façon différente ici, on ne fait pas appel à une mémoire de cuisinier. On cuisine en regardant autour de nous, en s’inspirant du monde et en créant des plats très internationaux sans pour autant se perdre dans une fusion ridicule.
Vous sentiriez-vous aussi libre en France ?
Je pense qu’on peut être libre partout, à condition de ne pas être lié par des contraintes économiques ou de management. J’ai la chance, malgré les 1500 chambres et 24 restaurants de l’Atlantis The Palm de pouvoir faire absolument ce que je veux dans mon restaurant. Et cette liberté me permet de créer certains plats très intéressants et de construire notre clientèle. Peut-être que je ne serais pas aussi libre en France… Même si je cultive le côté très chauvin du Français ! (Rires) C’est pour cela que le fait que Matfer soit une Maison familiale est important pour moi. C’est une des seules entreprises qui ne délocalise pas, qui utilise un savoir-faire français et je pense qu’il faut participer à ce système. Si l’on n’achète plus cette catégorie de produits, l’entreprise meurt et c’est de notre responsabilité.
Vous souvenez-vous de votre première rencontre avec Matfer ?
Matfer a toujours fait partie de mon parcours de chef. Partout où tu vas, tu as Matfer ! Pourquoi ? Pour la qualité ! Dans les nombreux restaurants gastronomiques où j’ai travaillé, tous utilisaient les produits Matfer. C’est une évidence, on ne se dit même pas « je vais commander du Matfer », on se dit juste « j’ai besoin d’équipements » et on se dirige naturellement vers Matfer. C’est le savoir-faire à la française, c’est qualitatif, ça dure dans le temps … Ma mère me dit toujours « achète de la qualité, tu paieras moins » et c’est vrai. C’est un investissement, mais c’est un produit qui n’aura pas besoin d’être remplacé. Pour moi, Matfer, c’est à la fois la qualité, le design, la praticité et bien sûr le savoir-faire à la française.
Quels sont vos outils indispensables ?
Le fouet ! Le fouet Matfer est exceptionnel, très résistant, très facile à utiliser. Je ne me passe pas non plus d’une plaque gastro. Ou un silpat, j’adore les silpat ! Il m’en faut des tonnes et des tonnes dans ma cuisine … Tout est extrêmement pratique. Dans ma cuisine, il y a des équipements Matfer qui sont ici depuis 10 ans et qui ne bougent pas.
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